Les Sénatoriales de 2013 au Cameroun
Rencontre-Débat du
Coredec
Organisation, déroulement et enjeux des premières élections sénatoriales au Cameroun
Le
Cameroun vient d’ouvrir une page importante de son histoire institutionnelle à
travers la mise en place de son tout premier Sénat. Le parlement camerounais,
qui était jusque-là constitué d’une chambre unique, en l’occurrence l’Assemblée
Nationale (la chambre basse), passe ainsi du monocaméralisme au bicaméralisme institué
à travers la constitution du 18 janvier 1996. La question du bicaméralisme
parlementaire au Cameroun a longtemps
divisé la classe politique camerounaise. Face aux prises de position de
l’opposition en faveur d’une mise sur pied rapide du sénat, l’establishment fit
montre d’un flegmatisme qui traduisait ses calculs politiques dans un contexte
où le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (le Rdpc), parti du
pouvoir, entendait conserver son influence au parlement afin de garantir
l’avenir et la sécurité politique de son leader. C’est ainsi que 17 années
s’écoulèrent entre l’institution légale du sénat et sa mise sur pied effective
à travers la désignation des cent sénateurs devant la constituer en cette année
2013.
Toutefois,
force est de constater que la constitution du sénat n’a pas contribué à
résorber les récriminations de l’opposition. Après l’annonce de la tenue des
élections sénatoriales le 14 avril 2013, les partis d’opposition sont montés au
créneau pour dénoncer ce qu’ils considéraient comme une incongruité du
calendrier et du corps électoraux. S’agissant du calendrier électoral,
l’opposition a estimé que les élections sénatoriales devraient être
consécutives aux élections municipales et donc à la mise sur pieds des conseils
régionaux d’autant plus que d’un point de vue légal, c’est aux conseillers
régionaux qu’incombe la charge de d’élire les sénateurs. De là découlaient les
récriminations relatives au corps électoral.
Compte
tenu de l’inexistence des conseils régionaux, c’est aux conseillers municipaux qu’a
été confiée la responsabilité d’élire les sénateurs. Du point de vue de
l’opposition, cette option était inopportune dans la mesure où le mandat
desdits conseillers municipaux était arrivé à expiration. Ils bénéficiaient
cependant d’une prorogation de mandat qui leur permettait certes de continuer à
exercer, mais qui d’après l’opposition ne suffisait pour que des
responsabilités de haute importance telle que la désignation des sénateurs
leurs soit confiées. Toujours est-il qu’au moment de la tenue des sénatoriales,
les colorations politiques des conseils municipaux ne reflétaient plus véritablement
le paysage politique camerounais qui avait eu le temps de s’enrichir et de se
diversifier depuis les dernières municipales de 2007. Les élections
présidentielles de 2011 ont en effet permis de constater l’émergence de
nouveaux partis aux ambitions politiques clairement affichés contre le régime
en place.
En
dépit de toutes ces récriminations, le Cameroun a organisé ses premières
élections sénatoriales le 14 avril 2013. Parmi les listes des quatre partis
politiques en lice (RDPC, SDF, UNDP et UDC), les conseillers municipaux ont
désigné 70 des 100 sénateurs devant constituer la chambre haute du parlement
camerounais. Quelques jours après la proclamation des résultats largement
favorable au parti du pouvoir qui est sorti vainqueur dans huit (08) régions
sur les dix (10) que compte le Cameroun, le Président de la République a
désigné par nomination la trentaine de sénateurs restant tel que le prévoit la
législation.
Il
est question au cours de cette rencontre débat, de porter un regard critique
sur les procédures et le processus ayant conduit à la constitution du premier
sénat camerounais. Les discussions vont essentiellement s’articuler autour des
modalités de désignation des 70 sénateurs par voie électorale. Dans cette
perspective, ce sont les problématiques relatives à la gestion du calendrier
électoral au Cameroun ainsi que la légitimité du corps électoral convoqué pour
ces premières sénatoriales qui seront mises en exergue. La reconfiguration du
jeu politique camerounais, à travers les prises de position du RDPC –parti du
pouvoir- en faveur du Social Democratic Front (SDF) historiquement reconnu
comme le principal parti d’opposition au Cameroun depuis le retour au
multipartisme survenu au début des années 1990, mérite également d’être
analysée d’autant plus qu’elle a déterminé la double coloration politique qui
caractérise le tout nouveau sénat camerounais. Dans la même veine, c’est le rôle
de Elecam –la commission électorale dont l’indépendance reste questionnable- dans
l’organisation de ces élections et l’orientation de leurs résultats qui devra
également être interrogé à travers la question du rejet de toutes les listes de
l’UPC et de certaines listes du RDPC notamment dans les régions de l’Adamaoua
et de l’Ouest. Avec un peu de recul, on est tenté de penser que ces rejets ont
été stratégiques d’autant plus qu’ils ont déterminé l’issue des élections dans
certaines régions du pays.
Lieu de la
rencontre: COREDEC-Ngaoundéré
Principaux intervenants:
● Bia Moussa: Le déroulement des sénatoriales de 2013 : enjeux et problèmes.
● Tallom Joël: Les rapports de force
entre le parti du pouvoir et l’opposition au Cameroun à travers les
sénatoriales de 2013 : entre jeu d’alliance et règlements de comptes
politiques.
Modératrice:
Djutchou Kemdem Zita Carine
Supervision
Scientifique : Amina Djouldé Christelle.
Francis Fogue Kuate
Version
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coordonnateur scientifique