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Rencontre debat du 05 fevrier 2012

Envoyée samedi 04 février 2012 à 00:00:00

CRISE DE DETTES SOUVERAINES EUROPEENNES : QUELS ENJEUX POUR LES PAYS DE LA ZONE FRANCS CFA ?

 

La crise financière observée en 2008 a eu des conséquences désastreuses qui restent d’actualité. Après la faillite de certaines banques ainsi que la dégénérescence des marchés et des places boursières, les répercussions de cette dépression financière, qui semblait pourtant résorbée, continuent de se manifester. Ses tentacules ont résisté à la fois au poids du temps et aux différentes mesures coercitives entreprises par les Etats-Unis et la France notamment en vue d’assainir le fonctionnement des institutions bancaires qui, du même coup, voyaient  leurs caisses renflouées à hauteur de milliers de milliards d’euro et de dollars. Ces mesures drastiques, envisagées par les puissances les plus capitalistes du monde qui voyaient leur capital de confiance diminuer du fait de cette crise, n’ont fait que l’anesthésier sans la résorber pour autant. Mais l’anesthésie ne  fut que de courte durée et la douleur de la crise se fit à nouveau ressentir. Quelques années seulement après que les puissances du G20 ont déclaré que la situation était sous contrôle et que les marchés et les places boursières passaient progressivement du rouge au vert, le système capitaliste nous a gratifiés d’une énième crise : celle des dettes de souveraineté observée en Europe depuis quelques mois.

En effet, après la crise financière internationale de 2008, l’Union Européenne est de nouveau frappée par la crise des dettes souveraines qui, comme un tsunami, a provoqué de profondes perturbations systémiques au niveau du fonctionnement politique et économique de la zone euro. La plupart des pays qui ont l’euro en partage, se trouvent dans l’incapacité de maintenir leur solvabilité au près de leur principal créancier qu’est la BCE (Banque centrale européenne). Dans l’histoire des finances, les crises des dettes souveraines surviennent après l’avènement  des crises de liquidité sur le marché financier[1]. C’est donc dire que la crise de solvabilité que connaissent certains pays de l’Europe est une conséquence directe de la crise bancaire internationale de 2008.

Après la Grèce qui a eu le malencontreux honneur d’inaugurer cette page sombre de l’histoire de l’Euro, le Portugal, l’Italie, l’Irlande et l’Espagne ont eux-aussi été affectés par ce virus. Comme deux médecins au chevet de leurs malades, la France et l’Allemagne  ont, en date du 27 octobre 2011, prescrit un traitement qui consistait en l’injection de 1000 milliards d’euro comme fond de soutien destiné à renforcer les capacités du FESF (Fond européen de stabilité financière).

Toujours dans le sillage de la médication envisagée en vue de soigner ce mal dans l’espoir de le guérir, des mesures d’austérité ont été prescrites à certains Etats de la zone euro. Craignant d’être affecté par le mal du fait de sa fragilité et de sa vulnérabilité économique, le médecin France s’est lui aussi imposé des mesures d’austérité. Cette initiative qui se voulait préventive n’a malheureusement pas empêché à la seconde économie européenne -après l’Allemagne- de perdre son triple A en janvier 2012  alors que l’euro célébrait son dixième anniversaire.

Dans ce contexte délétère, les pays d’Afrique francophone, du fait du lien ombilical légendaire qui lie leurs économies et leurs monnaies (Franc CFA Afrique de l’ouest et Afrique centrale) à la celles la France, sont aussi exposés à ce malaise et ce mal être économiques. Le rapport onusien de prévision économique mondiale pour le compte de l’année 2012 prévoit une croissance en berne dans l’Union Européenne. Au cours de cette année, le taux de croissance en Europe sera autour de 0,7% contrairement à celui de 2011 qui se situait  autour de 1,6%.[2] Au regard  de ces prévisions pessimistes, les experts de l’ONU craignent que le cancer de la dette souveraine européenne ne soit un risque pour l’économie mondiale en général et celle de la zone F.CFA en particulier. Cette crainte est légitime d’autant plus que l’économie française est arrimée à celle de ses anciennes colonies sans lesquelles elle ne serait qu’exsangue. Par la force de l’histoire couplée à la « logique de dépendance volontaire » des chefs d’Etats africains (Kako Nubukpo), les économies de la France et de son ancien pré carré sont devenues interdépendantes ; ce qui renforce l’idée d’une possible contagion systémique des pays de la zone FCFA.[3] C’est le rêve colonial français de création d’une union française qui pérennise ainsi plus de 50 ans après les indépendances.

Face à ce néocolonialisme économique il devient légitime de se poser la question de savoir si  les pays de la zone FCFA sortiront indemnes de la crise de la dette souveraine qui fragilise les économies de la zone euro ? L’interconnexion des économies occidentales et africaines dans un contexte de néocolonialisme et de mondialisation à outrance n’expose-t-elle pas les pays de la zone CFA à des nouveaux challenges liés à la crise européenne ? Faudrait-il s’attendre à une nouvelle dévaluation du CFA comme le prédisent certaines analyses politiques et économiques ?

Cet ensemble de questions constitue l’épicentre de la discussion organisée par le groupe de réflexion du Coredec dans le cadre de la reprise de ses activités ce dimanche 05 février 2012. Ainsi, il sera question de décrypter les causes profondes des crises de la dette souveraine en Europe, ses enjeux  dans la pratique économique des Etats utilisant le FCFA. Mais aussi dans une perspective historique, nous ferons une lecture des paradigmes de l’extraversion économique des pays africains ici concernés ainsi que leur incidence sur la condition de vassalité de l’Afrique.

 

Date, lieu et heure : 05 février 2012 dans les locaux du Coredec (Ngaoundéré) à partir de 14heures précises


Principaux intervenants :

Amina Djoulde Christelle 

Djutchou Kemdem Carine

 

Modérateur : Abdoun Nassir

 

Coordination : Francis A Fogue Kuate




[1] C. Reinhart et K. Rogoff, 2010, « From financial crash to debt crisis », NBER Working Paper, N°15795

[2] United Nations, 2012, World economic, situation and prospect.

[3] P. Jalet, Le pillage du Tiers-Monde, Paris, Maspero.

 


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