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REFLEXION CONJOINTE COREDEC-CRESA BENIN

Envoyée vendredi 04 février 2011 à 00:00:00

REFLEXION CONJOINTE COREDEC-CRESA BENIN THEME : Mouvements populaires antigouvernementaux en Tunisie et en Egypte: simple effet dominos ou traduction d’un nouveau modus operandi en situation dictatoriale ? L’actualité des ces dernières semaines en Afrique blanche a été marquée par des mouvements populaires anti gouvernementaux observés en Tunisie d’abord et en Egypte par la suite. Ces différents mouvements ont provoqué une surexcitation dans les villes tunisiennes et Egyptiennes. Contrairement aux villes mortes observées au Cameroun dans le début des années 1990 et qui visaient à déstabiliser le pays dans l’optique de provoquer le départ du président Biya devenu impopulaire, la situation vécue en Tunisie et en Egypte, qui est sous tendue par des motivations similaires (départ des Ben Ali et de Hosni Moubarak en Tunisie et en Egypte respectivement) est plutôt caractérisée par une extrême agitation. Mais que se passe-t-il concrètement ? En ce qui concerne la Tunisie, ce pays, qui affichait jusque là une sérénité sur le plan économique et politique -lorsqu’on ne tient pas compte des manigances de Ben Ali pour se maintenir au pouvoir- a laissé entrevoir, en l’espace de quelques jours, son véritable visage au reste de la communauté internationale. La crise tunisienne a en effet permis de se rendre à l’évidence que tout n’est pas que rose dans ce pays du Maghreb. La Tunisie s’accommode difficilement à la beauté des feuilles jaunes ou blanches odorantes du Jasmin qui représente la fleur emblématique de ce pays. La crise tunisienne de décembre 2010-janvier 2011, encore appelée révolution tunisienne ; « révolution du Jasmin » ou « Intifada de Sidi Bouzid », désigne une série de manifestations populaires menées à l’encontre de l’establishment en protestation contre la toute puissance du chômage et la cherté de la vie. Il s’agit d’un mouvement initié au sein de la population tunisienne mais qui a vite fait de se commuer en une manifestation hautement politique ayant conduit à l’exil saoudien du président Ben Ali. Mohamed Bouazizi, un marchand de fruits et de légumes à la sauvette dans la ville de Sidi Bouzid, est en effet celui qui a donné le la de cette révolution. Après avoir plusieurs fois été menacé dans la pratique de son activité par les employés municipaux, ce jeune diplômé issu d’une famille surendettée et réduit au chômage faute d’emploi, décida de manifesté son ras le bol. Pour cela, il tenta de s’immoler par le feu en s’aspergeant d’essence devant le siège du gouvernorat le 17 décembre 2010. Cette tentative de suicide, qui se solda par le décès de ce jeune tunisien de 26 ans, le 4 janvier 2011, suscita l’indignation des Tunisiens, qui, dans leur grande majorité, sont soumis aux mêmes conditions de vie que Mohamed Bouazizi, leur nouvel héro. Pour manifester leur solidarité envers ce dernier, les Tunisiens prirent d’assaut, les artères des principales villes du pays. Le taux élevé du chômage, la pratique de la corruption, du népotisme et les inégalités régionales sont les principaux griefs des manifestants à l’endroit du régime de Ben Ali. Les mêmes reproches sont également formulés à l’endroit de son homologue égyptien Hosni Moubarak. S’agissant de l’Egypte, tout porte à croire que les mouvements populaires qui y sont observés s’inspirent de l’expérience tunisienne qui a plus ou moins porté des fruits. L’occasion créant le larron, quelques jours seulement après l’exil du président tunisien, les Egyptiens ont jugé opportun, d’investir à leur tour les rues pour réclamer le départ de leur président au pouvoir depuis plus d’une trentaine d’années. Cette descente dans les rues, a donné lieu à une inta fada d’un nouveau genre entre les proches de Moubarak et ses adversaires. A peine sorti d’une crise religieuse provoquée par les violences orchestrées sur les chrétiens coptes au début du mois de janvier 2011, le gouvernement égyptien doit à nouveau faire face à des manifestations populaires qui le prennent directement pour cible. Difficile de rétablir l’ordre dans ces conditions ! Suite à ces différentes crises politiques qui semblent embraser l’Afrique du Nord comme par un effet domino, le Coredec, en collaboration avec le Crésa-Bénin, a initié une réflexion en vue de décrypter cette actualité. Il sera question, d’une part, de contextualiser ce regain de violence antigouvernemental afin d’en interroger les motivations réelles. D’autre part, il va falloir inscrire ces manifestations dans les réflexions relatives non seulement, aux modes d’expression et de participations politiques, mais aussi aux mécanismes de transition et d’alternance politique en Afrique. Il sera en effet intéressant de voir comment dans un monde dominé par la promotion des valeurs démocratiques et le fétichisme des élections -conçues comme le seul mécanisme par lequel le peuple procède aux choix de ses dirigeants- la violence tend à s’imposer comme régulateur de la vie politique. Face à l’inefficacité des modes classiques d’expression et de participation politiques, le peuple, assoiffé par son désir d’autodétermination politique qui passe notamment par la sélection de ses dirigeants, opte pour la violence. Cette violence, qui en situation démocratique, ne constitue pas une forme classique d’expression politique, se démarque à la fois des formes souterraines d’expression politique de Bayart et des modes clandestins de participation politique dont parle Taguem (2001). Cette violence n’est pas souterraine dès lors qu’elle s’élabore dans la rue avec un discours antigouvernemental assez bien articulé. Elle n’est non plus clandestine étant donné que les voies légales de participation politique sont corrompues et asphyxiées par des potentats en quête d’immortalité politique. La violence devient légale dans la mesure où elle s’élabore en réaction à un autre type de violence perpétré sur les institutions étatiques. La violence populaire se présente dès lors comme le seul recours dont disposent les populations dans la mise en œuvre de leur participation républicaine et la prise en compte de leurs choix politiques. Dans ce contexte, c’est la pensée politique de Hobbes qui semble refaire surface dans la mesure où on assiste finalement à une guerre de tous contre tous (l’état de nature). Le « léviathanisme » des gouvernants opposé à la volonté des populations à participer à la gestion de la chose publique crée une société politique dont la loi de la jungle devient le principal régulateur. Date et heure de la réflexion : dimanche le 6 février 2011 à partir de 14heures Lieu : Coredec (Ngaoundéré) Principaux intervenants : Elieth Eyébiyi (Chercheur au Cresa-Bénin) Francis Fogué Kuaté (Coredec) Modération : Affa Paul L. (Université de Ngaoundéré) Coredec Le coordonnateur des activités scientifiques
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